dimanche 17 mai 2015

Coup de chaud....

Initialement cela devait-être un voyage de 60 km. Il s'agissait de repérer un projet, situé entre St Guilhem-Le-Désert, les Gorges de la Vis et le Larzac, d'une longueur de 80 à 90 kilomètres selon les "options".


Préparer c'est déjà partir...

La voiture est garée, je suis seul, c'est bientôt le départ. Je transporte avec moi 3 litres d'eau, quelques aliments censés me nourrir, les 2 cartes nécessaires, un appareil photo, un t-shirt manches longues au cas où, une couverture de survie. Les prévisions météorologiques annoncent des températures estivales et m’incitent à prendre un couvre chef...je ne savais pas encore...

Enfin c'est le départ. Rapidement j'adopte un rythme fort agréable au cœur d'une région qui l'est tout autant...mais quelle chaleur! J'ai bien eu chaud ces dernières semaines en montagne ou sur les chemins mais c'est sans comparaison avec ces conditions qui semblent constituer la principale difficulté de la journée...

Ici je retrouve un secteur que j'ai beaucoup fréquenté dans les années 90 et qui me tient particulièrement à cœur. Il ne s'agissait alors pas de trail mais de plongée-souterraine. Véritable gruyère cette région cache, à celui qui passe trop vite, de formidables phénomènes karstiques. Les Gorges de la Vis et le Cirque de Navacelles en font partie. Les grottes, avens, sources et résurgences constituent les portes d'entrées d'un monde souterrain fantastique et discret. Durant une dizaine d'années, mon temps a été consacré aux plongées-souterraines, au point, mordu par le virus, de tourner le dos au monde marin pour un amour exclusif; l'exploration des conduits noyés du monde minéral. Quels souvenirs! 

Vingt ans plus tard dans ce même secteur, je cours. Les kilomètres défilent tranquillement et me rapprochent du bord du causse. Je m'efforce de boire régulièrement en pensant à l'air frais qui devrait parcourir le fond des gorges plusieurs centaines de mètres plus bas. Mais plus je descends et plus la température monte. Au fond, la chaleur est plus forte encore. J'ai l'impression d'être dans un four. Décidément cette sortie va être beaucoup plus difficile que prévue. Étonnement je cumule quelques contradictions; je cours assez vite depuis quelques heures et je ne ressens ni la soif, ni la faim. Sans y porter plus d'attention je savoure le chemin qui épouse les méandres des Gorges de la Vis.... 

Les Gorges de la Vis entourées des Causses du Blandas et du Larzac

Navacelles, enfin. Le village et le cirque éponyme sont encore épargnés des assauts touristiques. Je parcours une ruelle et m'arrête à une fontaine généreuse où je redécouvre l'eau fraîche. Vissec se situe à une bonne dizaine de kilomètres et je repars sans plus tarder. A ce moment là j'ai un premier doute; la reprise après cette pause très (trop) rapide est difficile. J'ai des douleurs musculaires, je ne me sens pas dans mon assiette, à la croisé d'un chemin j'hésite alors que la suite est évidente et...j'ai sommeil. 

Navacelles

La chaleur est constante et semble écraser tout autant le paysage que ceux qui en ont décidé la traversée à pied...de surcroît en courant! 

Un bien beau secteur pour courir...


La dizaine de kilomètres jusqu'à Vissec est longue, beaucoup trop longue. Le deuxième doute arrive vite; malgré toute l'eau absorbée depuis les quelques heures de course je n'ai toujours pas uriné. Je redoute le coup de chaud et me trouve de plus en plus dans le coton. Les montés sont difficiles après seulement 25 kilomètres de course. Les 35 kilomètres restant ne traversent ni hameaux ni villages et je me demande s'il est prudent de s'y engager dans cet état. La vue sur Vissec me rassure. La place du village doit comporter tout ce qui est nécessaire pour prendre une décision; une fontaine et de l'ombre. Mais bizarrement la terre bouge, l'horizon tangue et ce grand manège manque de me foutre en l'air. Stop. Inutile de poursuivre ainsi. La décision, sans l'aide de l'ombre et de la fontaine, est prise. Il faut savoir s'arrêter, renoncer et rentrer entier. Inutile d'attaquer la partie la plus longue et la plus déserte dans ces conditions....Après quelques calories qui ne passent pas et que je me force à consommer, j'attaque les 18 kilomètres de route qui devraient me ramener au point de départ le plus directement. 


Soudain le bruit d'un moteur me fait machinalement tendre le pouce. La voiture s'arrête, un sourire, la porte claque et la voiture redémarre. Le monsieur est très gentil et souhaite m'avancer un peu. La clim' est à fond et j'ai l'impression d'être maintenant dans une chambre froide. Un croisement, la voiture s'arrête et repart aussi vite en me laissant là. Le froid m'a visiblement fait du bien puisque je cours à nouveau 45 minutes de plus avant qu'une autre voiture ne s'arrête et ne me dépose au point de départ.


La fin est abrupte et je ressens ce que le marin partie pour une traversée à la voile doit vivre lorsqu'il arrive à destination remorqué par un autre bateau. Un coup de chaud peut se terminer par un malaise et je n'avais pas envie de vivre une telle situation isolé dans la garrigue. Je compte bien revenir terminer ce repérage seul ou entre amis et en évitant, c'est certain, les journées les plus chaudes...

Retour à la case départ ....cuit!



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